La combinaison de surf est l’accessoire indispensable pour les surfeurs et surfeuses du monde entier.

Elle a révolutionné les sessions de surf et a permis de développer ce sport dans des régions très froides de la planète. La combinaison est un produit largement mondialisé, on peut donc s’interroger sur sa fabrication et la consommation que l’on en fait.

D’où vient le néoprène, où sont fabriquées nos combinaisons et quel impact ont-elles sur l’environnement ? Ce sont les questions auxquelles nous allons essayer de répondre dans cet article.

L’histoire du néoprène

C’est au début des années 30 que le néoprène voit le jour avec l’entreprise Dupont (au passage, c’est une entreprise qui, depuis sa création, est un calvaire pour l’environnement et la santé de milliers de personnes dans le monde, voir la vidéo ici).

Grâce à sa résistance aux produits liquides, le néoprène s'utilise pour isoler les lignes de téléphone, les tuyaux, etc. Cependant, il a un seul problème : une odeur nauséabonde. La fabrication est alors revue pour faire tomber cet obstacle à la commercialisation de masse.

Grâce à ses propriétés chimique, la matière résiste bien à l’eau de mer : le néoprène conquiert dans les années 1950, le marché des activités aquatiques, lorsque les frères O'Neill créent les premières combinaisons de plongée.

La fabrication du néoprène de combinaison

Les combinaisons sont faites de néoprène, un caoutchouc synthétique. Il est découpé en feuilles ensuite laminées sur divers tissus.

Photo issue d'une vidéo de Sheico

Il existe de nombreux types de néoprène qui sont produits pour diverses utilisations. Par exemple, les combinaisons de surf sont utilisées à la surface de l'eau et doivent être légères et extensibles.

Cela signifie que le néoprène doit être suffisamment extensible pour que les surfeurs puissent bouger librement tout en portant la combinaison.

Les matières textiles laminées au néoprène doivent s'étirer suffisamment pour être confortables et sécher rapidement.

Au contraire, pour les combinaisons de plongée qui sont utilisées sous la surface de l'eau, le néoprène doit pouvoir maintenir son épaisseur (ne pas se comprimer de manière significative avec la pression de l'eau).

L'un des aspects les plus importants de toute combinaison est son épaisseur, qui varie de 1,5 mm à 7 mm. Plus le néoprène est épais, plus la combinaison sera chaude.

Une fois que l’on a choisi le type de néoprène, son épaisseur, les tissus laminés et le design de la combinaison, il faut choisir les accessoires que l’on y met.

Vient donc le placement des zones renforcées (notamment aux genoux) et la couture du ZIP qui servira à la fermeture (sur la face avant ou dans le dos). Ces choix se font dans un souci de confort et de durabilité.

Comment limiter son impact sur l’environnement ?

Pour parler de l’impact de la fabrication et l’utilisation des combinaisons sur l’environnement, nous avons eu la chance d’interviewer et poser nos questions à Julien Durant, co-fondateur de la marque Picture Organic Clothing

Quelques définitions avant de commencer :

Définition du « textile » dans les combinaisons :

Les rubans que les marques utilisent pour coller toutes les coutures à l’intérieur des combinaisons, c’est à la base un textile sur lequel on a mis du scotch double face (c’est vulgarisé) et qui permet à haute température, de venir et protéger toutes les coutures de la combinaison.

Et cette partie textile est essentielle parce que la mousse de néoprène, quel qu’elle soit la composition de ce néoprène, est ultra extensible. Et elle est bien plus extensible que le résultat que l’on connait quand c’est laminé.

Ce qui limite le « stretch » du néoprène, c’est le textile que l’on met de part et d’autre. Ces textiles sont ensuite laminés sur les pains de mousse.

Définition de l’étape de la Lamination :

La lamination c’est l’étape qui consiste à coller la feuille de néoprène avec la feuille textile. C’est un peu comme un sandwich, il y a une feuille textile de chaque côté, et la feuille de néoprène au milieu. Des colles entre en jeu, sans ou avec solvants (la majorité des marques de surf utilisent la colle sans solvant, car les solvants sont une grande source de pollution de l’environnement).

On entend souvent dans le milieu du surf, que toutes les combinaisons sortent des mêmes usines dans le monde. Qu’en pensez-vous ? 

C’est hyper réaliste, il y’a une entreprise qui s’appelle « Sheico » : ce sont eux qui font la pluie et le beau temps dans tout ce qui est néoprène et surf. C’est un industriel Taiwanais qui a des unités de productions au Cambodge, au Vietnam et en Thaïlande.

C’est une entreprise sur laquelle les grosses majors du surf s’appuient pour la production et pour monter leur propre usine car ils ont des compétences énormes en la matière.

Il existe d’autres petites entreprises, qui savent faire de l’assemblage par exemple, mais l’achat de plaque de néoprène se fait soit chez Sheico, soit chez Yamamoto (ce dernier étant l’autre seul fournisseur pouvant fournir une quantité suffisante de matière première pour réaliser une production).

Y a-t-il une limitation à innover dans ce secteur ?

Oui il y a une vraie limitation à innover car c’est qu’avec ces deux entreprises là que toutes les marques de surf doivent traiter.

Les marques peuvent seulement innover sur les patronages, les textiles qu’elles laminent et développent pour le néoprène.

Comment on peut donc innover ?

Il faut nouer des partenariats avec ses entreprises pour des investissements en recherche et développement. Il faut que les marques de surf challengent et convainquent les entreprises de production de néoprène à développer de nouvelles matières pour elles.

C’est ce qu’on a fait avec l’Ecoprène de Picture. On a bossé sur une formule la plus green possible.

C’est une mousse synthétique sans pétrole issue d'un mélange de calcaire issu de poudre de coquilles d'huître et de pneus recyclés.

Pour laminer la doublure en polyester recyclé issu de filets de pêche recyclés, nous utilisons Aqua-A™, une colle à base d'eau sans solvant et sans produits chimiques nocifs.

Photo © PICTURE / we_creative / Antoine Justes
Ou sont fabriquées les combinaisons de surf en général et plus spécialement celles de Picture ?
80% des combinaisons en néoprène (surf, plongée sous-marine, windsurf etc) qui sont vendues dans le monde sortent des usines Sheico. Le groupe possèdent des usines en Thailande, au Vietnam, au Cambodge et à Taiwan.

Les combinaisons de Picture sont fabriquées au Vietnam.

Quelles sont les spécificités des combinaisons Picture ?
Comment arrivez-vous à vous assurer que les cahiers des charges sont respectés ?

Au niveau environnemental :

Pour ce qui est de la construction et la composition du néoprène, on a choisi ce qui se fait de mieux et de moins impactant : on utilise des pneus recyclés, la base pétrole est remplacée par du limestone (roche calcaire), on ajoute du calcium issu de coquilles d’huitres, la lamination est réalisée avec de la colle sans solvant, le textile nylon est issu du recyclage de filets de pêche, le polyester utilisé pour le textile est issu de bio polyester (des bio-polymères issus du recyclage).

On favorise le nylon car il est beaucoup plus résistant, notamment à l’abrasion. (Dans 95% de nos combinaisons, c’est du nylon). Quand ce n’est pas possible structurellement d’en mettre, on utilise du polyester recyclé.

Au niveau de la durabilité :

Il ne faut pas oublier que le produit le plus écologique c’est le produit que tu ne changes pas.

Ce qu’on essaie de faire, mixer une construction qui a le moins d’impact possible sur l’environnement tout en proposant un produit qui va être durable dans le temps.

Comment calculez-vous la durabilité de vos produits et comment Picture se différencie des autres marques sur ce critère ?

La durabilité des produits vient de deux paramètres :
     - L’expérience de la marque par rapport aux produits qui ont été mis sur le marché et l’analyse des défauts pour ensuite les corriger.
     - L’expertise de la marque. C’est beaucoup de recherches et de développements. Grâce à nos ingénieurs textile en interne, nous sommes capables de choisir les matières les plus adaptées pour une plus grande durabilité.

Nous faisons le test du Martindale (test de durabilité) : C’est un test d’abrasion, c’est comme si du papier ponce faisait des rotations sur le textile.

Ce test détermine un nombre de tour à partir duquel le fil de la matière textile bouloche. Ce sont des standards qualité. L’industrie se positionne à 20 000 en standard, nous on est entre 30 et 35 000.

Donc on ne sort pas un produit qui n’a pas ce niveau de résistance.

Photo © PICTURE / we_creative / Antoine Justes

Existe-t-il un service réparation de la part de Picture pour les clients qui souhaitent réparer leur combinaison (Zip cassé, trous, déchirures) ? Comment ça marche ?

Pour l’instant, c’est présent sur tous nos produits de la catégorie « outdoor ». On fait le test depuis cette année. C’est rétroactif sur tous les produits historiques de la marque depuis sa création.

L’objectif, c’est de proposer une réparabilité à vie et rallonger la durée de vie des produits au maximum.

Le client paie seulement les frais d’envoi jusqu’au centre de réparation et nous, on prend en charge la réparation.

On a aussi l’ambition de lancer le service sur la combinaison mais on a encore besoin de se structurer à ce niveau et de trouver un assez grand nombre d’ateliers partenaires. Nous avançons étape par étape car c’est une activité nouvelle pour nous.

Quel est le mieux à faire selon vous lorsqu’on a une combinaison en fin de vie ? Existe-t-il un moyen de la recycler ?

Dans le néoprène c’est très compliqué. Il n’existe pas de solutions durables sur le long terme. Pour le moment elles sont incinérées.

Connaissez-vous l’empreinte carbone d’une combinaison Picture ? Comment est-elle calculée ? Comment se positionne-t-elle face à une combinaison « classique » (néoprène issue du pétrole) ?

On calcule effectivement notre empreinte carbone par produit. Les chiffres sont basés sur les données que les industriels nous fournissent :
     - Consommation électrique
     - Consommation de matières premières

C’est ce qui nous donne des grands ordres d’idées, on connaît le gain carbone d’un choix à un autre.

Entre une combinaison classique (faite à base de néoprène neuf) et une combinaison Picture, il y a un gain carbone entre 50-60%.

Cela étant, il faut savoir que la combinaison classique est de moins en moins choisie par l’industrie du surf. Toutes les marques essaient de jouer le jeu, certaines plus que d’autres, et certaines le communiquent plus que d’autres d’ailleurs.

Pensez-vous réalisable de mettre en location les combinaisons Picture comme vous l’avez mis en place pour le matériel de ski

Oui c’est réalisable. Il faut savoir que cet été (2022) on devait lancer le service mais on a eu des soucis au niveau de nos livraisons et de nos stocks de combinaisons. Donc ça devrait être en place pour l’année prochaine.

Le mot de la fin :

Il existe de réels progrès de fabrication depuis les débuts de la fabrication des combinaisons de surf dans les années 50.

Leur impact est beaucoup plus faible mais il reste quand même conséquent.

Comme on l’a dit précédemment, il ne faut pas oublier que la combinaison la plus écologique c’est celle que tu as déjà !

Sources :

Srface : https://srface.com/fr/base-des-connaissances/quest-ce-que-le-neoprene-limestone/

Wikipédia, histoire du néoprène : https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9opr%C3%A8ne


Le Monde, histoire du néoprène : https://www.lemonde.fr/mode/article/2014/04/04/un-peu-d-histoire-le-neoprene_4394938_1383317.html

The Inertia : https://www.theinertia.com/surf/heres-how-wetsuits-are-actually-made/

Combinaisons Picture : https://www.picture-organic-clothing.com/

15 septembre, 2022